Nilda, alias Tehau sur Tiktok, l’employé fictif et touchant de la Laiterie Roche

Pourquoi vous êtes-vous mise à la communication de la Laiterie Roche ?

« Mon tāne, qui a repris la Laiterie Roche, m’a demandé il y a quelques années de le rejoindre pour l’aider. Nous avions de très bons produits, mais ils ne se vendaient pas bien. J’ai donc décidé de me lancer dans le marketing, la communication. J’ai suivi une formation de six mois en ligne car cela n’existait pas en Polynésie. Pendant la formation, on m’a conseillée d’utiliser essentiellement deux réseaux sociaux pour la Polynésie, Facebook et TikTok. Je n’étais vraiment pas du tout réseaux. J’ai appris comment les utiliser, à faire des vidéos… »

Comment se sont passées les premières vidéos ?

« Pas super. On m’avait conseillée de rester très professionnelle. Mais cela ne fonctionnait pas bien, je perdais beaucoup de temps à faire des vidéos qui ne me correspondaient pas car ce n’était pas moi en fait, alors j’ai décidé de faire à ma sauce. »

« À votre sauce », c’est-à-dire ?

« J’aimais bien faire rire quand j’étais petite. Quand j’étais jeune, j’aimais bien participer aux animations autour du feu. Un animateur m’avait d’ailleurs dit que je devrais faire des sketchs, cela m’avait fait rire à l’époque […]. J’ai commencé à réaliser mes propres vidéos humoristiques sur TikTok. Je m’inspire de scènes qui se sont réellement produites à la laiterie, soit quand je reçois des clients en face à face, soit quand quelqu’un m’appelle, soit quand on me laisse un commentaire. Et je mixe tout cela à ma sauce. Et ces vidéos ont fonctionné, elles ont décollé, jusqu’à faire de très bonnes statistiques. »

Comment expliquez-vous ces bons résultats ?

« En fait, les gens se sont reconnus dans le client et même dans la personne qui vend. TikTok permet vraiment de casser la barrière entre l’entreprise et les clients. »

Comment est né le personnage de Tehau ?

« On avait fait des entretiens pour recruter. Et j’ai vu qu’il y avait pas mal de lacunes, que les jeunes ne savaient pas trop se présenter, quoi dire. Alors j’ai décidé de faire une vidéo en jouant le rôle du recruteur et de la personne qui cherche un travail. J’ai accentué bien sûr un peu les traits, mais il y avait vraiment de ça. J’ai inventé le personnage de Tehau comme cela, mais au départ, c’était juste pour cette seule vidéo d’embauche. »

Tehau est devenu très populaire ?

« Oui. Après la diffusion de la vidéo, il s’est vraiment passé quelque chose, les gens se sont reconnus dans Tehau. Il a touché ma communauté et elle me l’a réclamé. Il faut savoir écouter sa communauté. Avant je faisais 1 000 abonnés par mois et là, en trois mois, j’ai pris 20 000 abonnés. Alors je me suis vraiment dit qu’il fallait que je refasse quelque chose avec lui. Et c’est comme cela qu’après son mois à l’essai, j’ai décidé de faire une vidéo pour l’embaucher en CDI. »

Quelle cible avez-vous touchée avec Tehau ?

« Avant je touchais environ 80 % de femmes, maintenant, avec Tehau, je touche également pas mal d’hommes, des jeunes et aussi des enfants. »

Certaines personnes ont même cru que Tehau était une vraie personne…

« Oui. C’est fou, les gens me demandaient s’il était célibataire, s’ils pouvaient le voir, le rencontrer. Il a vraiment fallu bien leur expliquer ! […] »

Comment préparez-vous vos vidéos ?

« Je les prépare avec attention, surtout pour Tehau. J’écris un script puis j’enfile la casquette et le t-shirt, je mets le filtre et je filme. Comme je joue le rôle d’un homme, j’essaye de prendre une voix grave, mais souvent, à la fin de la vidéo, ma voix est plus aigüe. Je m’inspire des commentaires que l’on m’envoie pour trouver pleins d’idées, je reprends les mots de ma communauté car, d’habitude, je n’utilise pas le même genre d’expressions que Tehau. »  

Comment votre confiture de coco est-elle devenue votre produit star ? Les gens se l’arrachent…

« C’est parti d’une vidéo où je teste le yaourt bifidus nature, que je n’aime pas, avec de la confiture de coco, que je n’aime pas non plus. Cela a fait découvrir notre confiture de coco, qui existait pourtant depuis vingt ans. Avant, on faisait une production une fois tous les quatre mois, maintenant, on est passé à huit productions par jour, et en une heure tout est liquidé. Je suis obligée de mettre des quotas. Il y a même des gens qui viennent en bus de Mahina pour en acheter directement à l’usine. »

Vous avez lancé maintenant vos propres formations…

« Oui. Beaucoup d’entreprises ont vu mes vidéos et les ont aimées. Elles m’ont contactée pour savoir si je pouvais faire leur communication, mais avec ma tête, cela n’est pas possible car mon visage incarne la Laiterie roche. Par contre, je leur ai dit que je pouvais leur apprendre à communiquer sur TikTok. J’ai maintenant une bonne expérience sur ce réseau, j’ai testé beaucoup de formats pour trouver ce qui fonctionnait en Polynésie. Je représente une entreprise qui vend un produit à un client, mais je suis là avant tout pour mon client. Avant de proposer un produit sur TikTok, je lui montre nos valeurs de la Laiterie roche, on travaille, mais dans la bonne humeur, avec de l’humour, dans un esprit familial. »